10.000 intérimaires pourraient faire les frais des difficultés des industries automobile et aéronautique. Pour autant, le secteur se porte bien. Adecco met l'accent sur la transformation digitale.
L'intérim reste porteur en France malgré la guerre en Ukraine
10.000 intérimaires pourraient faire les frais des difficultés des industries automobile et aéronautique. Pour autant, le secteur se porte bien. Adecco met l'accent sur la transformation digitale.
Avec ce marché mouvant, les spécialistes du travail temporaire doivent faire preuve de souplesse et de réactivité, en plus de suivre les grandes mutations du marché de l'emploi.
Avec ce marché mouvant, les spécialistes du travail temporaire doivent faire preuve de souplesse et de réactivité, en plus de suivre les grandes mutations du marché de l'emploi. (NeydtStock/Shutterstock)
Par Martine Robert
Publié le 8 avr. 2022 à 10:59
Les spécialistes de l'intérim sont aux premières loges des difficultés économiques du moment. « L'économie ralentit avec les difficultés d'approvisionnement de l'aéronautique et de l'automobile, les pénuries dans le BTP qui manque de bois ou d'aluminium avec les usines détruites en Ukraine, dans l'agriculture pour les engrais, et même la santé avec les carences en métaux rares, dont la Russie est le premier gisement… », énumère Isabelle Eynaud-Chevalier, déléguée générale de Prism'Emploi, l'organisation professionnelle du travail temporaire.
Dans ce décor chahuté, l'intérim est également touché, « même si nos difficultés sont concentrées à hauteur de 80 % dans les bassins automobiles et de 5 % dans les bassins aéronautiques », précise la responsable. Quelque 10.000 intérimaires pourraient en subir les conséquences alors que le recours possible à l'activité partielle dans l'intérim a pris fin le 31 mars, et que le manque de visibilité s'accroît. Ce qui est relativement peu rapport aux plus de 700.000 équivalents temps plein du secteur.
Recrutements en vue
« Janvier était un bon mois avec une croissance de 14 % mais, dès fin février, on observait un tassement et on mesurera réellement les difficultés quand on disposera des chiffres de mars. L'industrie est un gros pourvoyeur de travail temporaire. Or, on ne peut pas basculer facilement du jour au lendemain des effectifs d'intérimaires », abonde Isabelle Eynaud-Chevalier.
Avant la guerre, selon le baromètre d'un concurrent d'Adecco , la prévision nette d'emploi en France affichait en croissance de 23 % sur avril-juin 2022, certes en repli par rapport au trimestre précédent encore plus dynamique. Les intentions d'embauche décéléraient dans 7 des 11 secteurs étudiés. C'était déjà dans la construction et l'industrie manufacturière que la progression était la plus limitée (+10 %), alors que l'immobilier et la banque finances tablaient sur 20 points de croissance, et que le numérique, la communication, les médias, semblaient les plus prometteurs.
« Bien sûr, la crise nous inquiète, rajoute de l'incertitude. Toutefois, je ne pense pas qu'elle aura raison de la reprise. Certains secteurs souffriront plus que d'autres », relativise Alexandre Viros , le président France The Adecco Group. Le dirigeant compte d'ailleurs renforcer ses propres forces vives en recrutant un millier de collaborateurs, comme ManpowerGroup qui prévoit d'embaucher 1.700 personnes pour son développement en France.
Capacités d'adaptation
Avec un marché de l'emploi mouvant, les spécialistes du travail temporaire doivent faire preuve de souplesse et de réactivité, en plus de suivre les grandes mutations du secteur. « L'intérim ne s'est pas autant digitalisé que le retail ou le voyage. Il faut aller plus loin, notamment pour avoir une connaissance plus fine, grâce aux données recueillies, de nos candidats, car je considère que ces derniers sont autant mes clients que les entreprises, surtout en situation de pénurie de personnel », explique Alexandre Viros.
Dans cet objectif, Adecco France a acquis en septembre 2021 Qapa , numéro deux français de l'intérim digital. Ce marché a été multiplié par 8 en France en deux ans, atteignant 350 millions d'euros. « C'est un actif technologique qui nous sort de notre zone de confort. En six semaines, nous avons fusionné leur base de données et celle d'Adecco pour former la plus importante base de candidats de France », se félicite le dirigeant, qui réfléchit aussi à investir le Métavers.
Son autre priorité est la formation, comme le secteur en général, qui y consacre 3,35 % de sa masse salariale. « Le groupe a fait beaucoup pour accompagner ses intérimaires, mais il faut maintenant se centrer sur la formation d'anticipation face aux transformations du marché de l'emploi dont la pandémie a exacerbé les tensions. Nous avons formé 41.000 personnes l'an dernier. Nous figurons dans les cinq premiers acteurs et nous voulons être leader d'ici 2025 de la formation professionnelle », lance Alexandre Viros.
Le dirigeant mise aussi sur l'inclusion. « Nous sommes un opérateur d'insertion sociale par l'activité économique depuis 25 ans avec Humando, et les besoins ne baissent pas. Nous disposons une centaine d'agences spécialisées et nous voulons passer à 150, pour suivre 15.000 candidats au lieu de 7.500 aujourd'hui » précise-t-il.
Alors que la France conjugue toujours paradoxalement un grand nombre d'emplois non pourvus et un taux de chômage de 7,9%, Alexandre Viros estime qu'un groupe comme Adecco peut ainsi contribuer à changer la donne, également en incitant les entreprises à ne plus juger les candidats essentiellement sur leur diplôme - une spécificité tricolore - et en aidant certains secteurs à renforcer leur attractivité tel le BTP qui offre de vraies trajectoires ascendantes.
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